454                         HISTOIRE DE LA TAPISSERIE
depuis le commencement de la révolution jusqu'à nos jours, parce que cet établissement, depuis longtemps sans rival, a contribué dans une large mesure, par suite de la fausse direction imprimée à ses .travaux, aux tristes résultats que. nous sommes réduit à constater.
Il est certain que chaque fois que Ies tapissiers contemporains ont voulu se mesurer avec leurs devanciers, chaque fois qu'ils ont copié, comme ils l'ont fait lors de l'exposition universelle de 1878, quelqu'une des célèbres tentures de Louis XIV ou de Louis XV, ils sont restés, malgré un incontestable talent et en dépit de tous les progrès de la science, fort au-dessous de leurs modèles.
Le peintre Pierre étant mort en 1789, l'architecte Guillaumot le remplace, comme il a été dit plus haut. L'arrivée du nouveau directeur devient le signal d'une réforme radicale dans l'organisation des ateliers. Au travail à la tâche est substituée la rétribution fixe à la journée ou à l'année. On attendait sans doute de ce changement une exécution plus soignée; mais cette modification dans les habi­tudes devait singulièrement refroidir l'ardeur et l'activité des tapis­siers. Au surplus, c'était peut-être l'unique expédient qui pût assurer l'existence de la manufacture, car tous les entrepreneurs, ruinés et réduits à la dernière détresse, étaient alors sur le point d'abandonner les ateliers.
Peu de temps après, une décision funeste est prise, sans doute par mesure d'économie. On supprime le séminaire où se formaient les jeunes apprentis et l'Académie où ils apprenaient le dessin. D'ailleurs, pendant toute la tourmente révolutionnaire, les différents •administrateurs qui se succédèrent aux Gobelins n'eurent pour prin­cipale préoccupation que de sauver la manufacture d'une ruine com­plète. Ils y parvinrent à grand'peine, et au prix d'efforts incessants. Il faut leur tenir compte de ce résultat, et ne pas les juger trop sévère­ment, s'ils firent parfois des concessions regrettables à l'esprit du temps. Ils n'auraient rien obtenu par une inflexibilité intrai­table de principes et de conduite.
Au commencement de l'année 1791, les ateliers des Gobelins comptaient encore cent seize tapissiers et dix - huit apprentis. Ils furent divisés en quatre classes d'après leur habileté, avec la per­spective de passer progressivement de l'une à l'autre.
Les modèles de Boucher, dont Pierre n'avait fait que suivre les